LA LLORONA un conte mexicain

Alors que nous traversons tous une période de ralentissement forcé, voire d’arrêt de nombre de nos activités, ce temps peut être l’occasion de s’assoir pour raconter et écouter des histoires, comme le faisaient régulièrement les Anciens.

Une histoire m’a beaucoup touchée il y a quelques semaines à travers plusieurs synchronicités et je souhaite partager avec vous comment elle résonne en moi ces derniers jours au fil de l’actualité.

C’est une légende mexicaine très ancienne qui raconte l’histoire de la LLORONA, la femme qui pleure.

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Il en existe plusieurs versions, la plus ancienne parle de la LLORONA qui apparaît comme un fantôme peu avant l’arrivée des colons espagnols en Amérique, pour prédire les massacres des Indiens que les envahisseurs vont perpétrer.

Les versions plus modernes parlent d’une femme très belle qui est amoureuse d’un riche espagnol avec qui elle va avoir deux enfants. Celui-ci a construit des usines sur la rivière qui vont polluer son eau.

La LLORONA boit l’eau de la rivière alors qu’elle est enceinte et les enfants naissent aveugles, les mains palmées.

Son amoureux l’abandonne alors pour une femme riche attirée par ses biens ;

De désespoir la Llorona noie ses enfants dans la rivière pour leur épargner un destin douloureux et meurt de chagrin.

Elle est condamnée à récupérer l’âme de ses enfants pour pouvoir entrer au paradis.

On raconte alors qu’on l’entend pleurer la nuit alors qu’elle erre dans le lit de la rivière à la recherche de ses enfants.

On peut lire ce conte dans « Femmes qui courent avec les loups » de Clarissa Pinkola Estès.

Dans son interprétation, celle-ci met en avant la situation de la femme individuelle dont l’énergie créatrice, inscrite dans flux de la rivière dont l’eau claire soutient toutes les formes de vie, est empoisonnée par un masculin avide de richesse et de pouvoir.

C’est la souffrance ancestrale des femmes des sociétés patriarcales, souffrance terrible puisque la LLORONA va même perdre ses enfants, la promesse d’un futur qui n’adviendra pas…

La plupart du temps les contes proposent un « happy end », une résolution de la crise mise en scène dans l’histoire, mais là …non ce n’est pas le cas.

L’histoire ne peut s’achever, la LLorona continue à pleurer, à appeler ses enfants et à hanter les nuits des vivants.

J’ai baissé un temps le son des médias, et je mets à profit le silence qui s’installe dans mon quotidien pour écouter plus loin , plus profond et j’ai entendu à nouveau les pleurs de la Llorona.

Quel message pour moi, et peut-être pour nous tous collectivement dans l’expression de cette souffrance qui dure depuis si longtemps et qui n’en finit pas, prenant des manifestations différentes suivant les époques et les circonstances ?

Cette souffrance est toujours la même et il serait temps de l’entendre…pour qu’elle puisse trouver sa voie d’apaisement et de guérison…car dans les contes, il existe toujours une voie de guérison même si elle demande une transformation, et un prix à payer.

Quelle transformation la Vie exige-t-elle de nous avec la crise que nous traversons ?

Il m’apparaît tout d’abord que le premier pas semble d’arrêter le bruit de nos usines, celles construites par l’homme riche et avide de pouvoir, celles qui polluent la rivière, pour entendre la souffrance de la Llorona…

La Llorona parle entre autre de la souffrance de notre âme dévalorisée, voire méprisée par un mental rationnel aveuglé par un désir de croissance illimitée, et qui a perdu la connexion avec la Nature et ses lois au point de mettre en danger l’avenir de notre espèce.

Qu’est- ce que notre âme ? Ce mot recouvre différentes croyances mais il me semble que nous y retrouvons toujours la dimension de notre sensibilité, de nos aspirations profondes qui nous « animent » et nous poussent vers la réalisation de notre humanité sur tous les plans …La question est de devenir plus humain…

L’âme est féminine dans son essence, lorsque nous communiquons avec elle, nous nous ouvrons à nos sentiments, à l’art, à la poésie et nous devenons créatifs pour développer de nouveaux paradigmes dans notre société, dans toutes les sociétés car l’enjeu est mondial aujourd’hui.

Nous entrons dans une dimension de notre humanité qui nous fait expérimenter notre appartenance à l’univers, au grand tissage de la Vie manifestée dans tous les règnes, humains et non humains, dans le respect et la conscience de quelque chose de plus grand que nous .

Cela revient à nettoyer la rivière empoisonnée et à œuvrer pour qu’elle se remette à couler librement et joyeusement.

A cette condition la Llorona retrouvera l’âme de ses enfants, elle sèchera ses larmes et trouvera la paix.

Elle sera réhabilitée parmi les vivants, et un homme nouveau ouvrira son cœur en la regardant et l’aimera.

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